3.
L’absolutisme religieux.
Il s’observe dans deux directions :
a) La volonté du roi de se rendre maître de l’Eglise de France. Dans ces rapports tendus, Louis XIV sera soutenu par une grande partir du clergé français.
b) La volonté du roi d’être le maître du dogme. Elle s’illustre par une phrase : « un roi, une loi, une foi ». Il luttera contre le protestantisme (révocation de l’éit de Nantes en 1685) et les jansénistes.
a) Le renforcement du gallicanisme :
C’est une doctrine et un ensemble d’attitudes qui visent à préciser le statut de l’Eglise de France face au pape d’une part et face au pouvoir royal d’autre part. Le tout visant à assurer une autonomie de l’Eglise de France.
Qu’est-ce que l’affaire de la Régale ?
En France, la Régale est un droit qu’avait le roi de percevoir les revenus de certains évêchés quand ils devenaient vaquant et de conférer les bénéfices ecclésiastiques. Le roi étant ce pouvoir régal à tout le royaume en 1673.
En 1682, une assemblée du clergé français donne raison au roi contre le pape. Elle publie aussi la « déclaration des quatre articles » :
=> Les rois n’ont pas de supérieurs pour les choses temporelles (il ne peut pas être déposé par le pape).
=> L’autorité des conciles oecuméniques est supérieure à l’autorité d’un pape.
=> L’Eglise gallicane (= de France) dispose de privilèges inviolables.
=> Le pape a un rôle fondamental dans la définition du dogme mais son jugement n’es pas irrévocable. De plus, ce jugement doit avoir l’approbation de l’Eglise nationale.
Louis XIV va s’empresser de faire reconnaître ce texte. On devra même l’enseigner dans les séminaires.
En 1693, il fait des concessions et renonce à ordonner que le texte de la déclaration fasse l’objet de l’enseignement dans les séminaires.
Attention : le gallicanisme est différent de l’anglicanisme qui appartient à la Réforme. Le gallicanisme est un catholicisme à la française.
b) Le dogme :
A) La lutte contre le protestantisme.
La France vit sous le régime de l’édit de Nantes (1598) et de l’édit d’Alès. Ce dernier est aussi appelé l’édit de Grâce. C’est à l’époque de Louis XIII et de Richelieu qui veut mater les protestants parce que le roi doit être maître chez lui. Il prendra La Rochelle et imposera sa volonté aux protestants. A partir de là, les places de sûreté tombent. Louis XIV va essayer de vider l’édit de Nantes de son contenu. Il prendra des mesures restrictives. Ex :
=> on démolit tous les temples construits après l’édit de Nantes
=> Le roi soutient une caisse de conversion : caisse pour donner de l’argent à ceux qui vont se convertir
=> restriction à partir de 1680 dans les fonctions publiques si on est protestant mais aussi dans des fonctions médicales et paramédicales
=> on va réquisitionner les maisons de protestants les soldats (les dragons) vivent là.
Ainsi, dans les années 1680, toutes ces mesures vont amener Louis XIV à croire qu’il n’y a plus de protestants d’où le fait que l’édit de Nantes n’a plus de raison d’être. Il le révoque donc. Les gens qui seraient encore protestants doivent soit se convertir ou s’exiler. On enverra des missionnaires dans le pays afin de s’assurer de la conversion. L’édit qui révoque l’édit de Nantes est celui de Fontainebleau. 200 000 Français vont exiler dans des pays protestants, c’est le Refuge protestant (dans les Provinces-Unies, la Suisse, le Brandebourg, l’Angleterre, la Suède, le Danemark et certaines principautés protestantes de l’empire).
Certains résistent quand même en France :
=> La résistance passive : on donne les apparences du catholicisme (on fait baptiser ses enfants, on va à la messe…) mais on pratique la religion protestante intérieure. C’est l’attitude nicadéliste de Nicodème, juif de la Bible.
=> La résistance violente : révoltes. Ex : la révolte des Camisards issus des Sévènes.
B) La lutte contre le jansénisme.
C’est une doctrine et une sensibilité chrétienne. A l’origine d’un théologien des Pays-Bas espagnols, Cornelius Jansenius. C’était l’évêque d’Ypres en 1636. il meurt en 1638 avant même de devenir célèbre car ce qui va faire le jansénisme, c’est le livre publié en 1640, l’Augustinus. C’est une somme des thèses de St Augustin. Sa thèse principale est que le salut de l’homme ne dépend pas de la volonté de l’homme mais de la grâce souveraine de Dieu. L’homme ne peut pas tout seul lutter contre sa nature qui est foncièrement mauvaise, pécheresse. Seule la grâce de Dieu peut le mener vers le bien. Derrière tout cela se cache une vision très négative du monde. C’est une doctrine très sévère avec une obsession du mal.
Le Français Jean Devergier de Hauranne, St Cyran, a permis la diffusion de l’Augustinus. Il était abbé commendataire, qui devait désigner quelqu’un pour faire le travail à sa place. A partir de 1640, il assurera la diffusion du livre et des idées jansénistes. Les idées se répandront aussi dans l’abbaye de Port-Royal des Champs qui deviendra le sanctuaire du jansénisme. Le pape condamnera les jansénistes d’abord en 1640 et l’Augustinus sera condamné plusieurs fois par les bulles pontificales (ex : en 1713, la bulle unigenitus).
Pourtant, ça continuera en France grâce à des débatteurs (ex : Antoine Arnauld). Blaise Pascal publiera un certain nombre de lettres connues sous le nom des provinciales. Sous la forme de lettre, il diffuse la pensée et ridiculise les jésuites, adversaires. C’est à l’époque de Mazarin. Les provinciales circulent clandestinement sur feuilles volantes puis, en 1657, elles sont publiées groupées sous un pseudonyme même si tout le monde sait que c’était Pascal qui les écrivait.
En 1643, le texte « de la fréquente communion » écrit par Antoine Arnaud dit que la communion est trop importante pour qu’on la galvaude. Il faut vraiment faire pénitence, il faut la mériter.
En 1649, un théologien parisien, Cornet, le porte-parole des théologiens, résume en 5 propositions les thèses de l’Augustinus. Il les soumet à ses collègues et 40 d’entre eux décrètent que ces textes ne sont pas hérétiques. Il y a donc un malaise qui s’installe et ils s’adressent à Rome qui va les examiner et en 1653, une nouvelle bulle va condamner une seconde fois le jansénisme.
On ne cherche pas à savoir si ces propositions étaient réellement tirées de l’Augustinus. C’est la question du droit et du fait : le pape condamne (c’est le droit) mais ce n’est peut-être pas la vérité (c’est le fait). Le roi se servira de cette distinction pour faire signer le « formulaire », mais les sœurs de Port-Royal refuseront.
Cette querelle va durer toutes les années 1660 entraînant une nouvelle bulle du pape. En 1661, un nouveau formulaire va être promulgué pour obéir aux bulle du pape (et donc à la condamnation du jansénisme).
En 1669, la « paix de l’Eglise » ou la paix clémentine (du nom du pape Clément IX) est un accord entre le roi de France et le pape, entre les jansénistes et les autres. Ca rend possible la signature du formulaire : on signe mais on peut émettre une réserve sur la question du fait (c’est observer un silence respectueux sur la question).
Conséquences :
Port-Royal va vivre sa période la plus prodigieuse entre 1669 et 1679. des hommes vont venir s’installer tout près et vont ouvrir des écoles (les petites écoles de Port-Royal) pur les petites classes (ex d’élève célèbre : Jean Racine).
Il y aura une remarquable traduction de la Bible (la Bible de Port-Royal).
Pierre Nicole est un des grands auteurs, moralistes qui se fait remarquer.
Port-Royal devient un haut lieu de la vie sociale.
Louis XIV va vouloir affirmer l’hégémonie de la France en Europe. Et donc dans les années 1660/1670, son attention est attirée par les conflits chez nous. En 1679, le traité de Nimègue est signé. Louis XIV est en paix avec l’extérieur, il va ainsi pouvoir s’occuper du parti janséniste.
Après la paix de Nimègue, la répression s’abat sur Port-Royal (on chasse tout ceux qui ne sont pas des religieuses et on interdit de recruter des novices). On force Arnauld à un exil. C’est la répression alors que commence un second jansénisme dont le principal représentant avec Arnauld sera Quesnel, auteur de « Réflexion morale ». C’est un jansénisme très soucieux d’une Eglise réformée, purifiée des abus dénoncés par Luther. Il défend une Eglise très gallicane, très égalitaire (communauté de fidèles). Le livre de Quesnel sera aussi condamné.
Au 18e (1701), l’affaire janséniste sera relevée devant l’affaire du cas de conscience : un curé demande à la Sorbonne s’il est possible d’absoudre des prêtres qui, tout en condamnant les 5 propositions, on observé un silence respectueux face à la question du fait. Il ne sait pas quoi faire. Cette affaire jette le trouble car beaucoup trouve qu’on peut absoudre (càd que les jansénistes n’ont pas tort puisqu’on ne stigmatise pas les prêtres). D’où une nouvelle condamnation du jansénisme en 1705 par la bille Vineam Domini (3e grande condamnation). La répression va devenir terrible :
=> En 1709, on ferme Port-Royal et ses 17 sœurs sont réparties dans d’autres couvents.
=> En 1711, le couvent sera rasé et les sœurs qui y étaient enterrées seront déterrées car on venait se recueillir sur les tombes.
Louis XIV va accentuer sa pression sur le pape pour qu’il condamne encore en 1713 avec la bulle Unigenitus. Il y a eu en tout, 4 bulles importantes, des exils, des remous, des déplacements…
La question est pourquoi ?
La volonté du roi d’être la maître du dogme et de réduire l’opposition. Toutes ses actions visent à éliminer les jansénistes (comme les protestants) mais cela ne marchera pas (comme avec les protestants).
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